mardi 22 août 2023

[Harmonica diatonique] Musique classique à l'harmonica diatonique - Généralités

J’ai commencé l’harmonica diatonique il y a environ sept ans parce que j’étais fascinée par le son et les capacités expressives de cet instrument, et ce dans des genres musicaux très différents. Je me suis dit que ce son incarnait très exactement ce que la musique m’inspirait et qu’il me permettrait sans aucun doute d’exprimer au plus près mes émotions. Très vite j’ai appris que ce qui me plaisait était le jeu chromatique sur l’harmonica diatonique, je me suis donc lancée dans l’apprentissage des altérations et des overnotes qui m’a occupé pendant un bon moment et qui, je suppose, sera toujours au cœur de mes préoccupations. Après m’être essayée dans de nombreux styles, j’ai eu envie d’entendre comment sonnerait la musique classique que j’aimais si elle était interprétée à l’harmonica diatonique. J’ai enchaîné les enregistrements depuis. Avant tout, un constat s’impose : l’harmonica diatonique n’est pas fait au départ pour jouer de la musique classique (ni du blues, d’ailleurs). Il a été créé au milieu du XIXe siècle pour jouer de la musique folklorique et populaire allemande au sens large. On n’a commencé à développer sur cet instrument un jeu chromatique avec altérations et overnotes que récemment, durant ce dernier demi-siècle. Aucune musique « classique » au sens strict n’a donc été composée pour l’harmonica diatonique. Certes, la composition pour un instrument précis est un concept assez récent qui ne s’est renforcé qu’au XIXe siècle. Certes, nous sommes habitués à entendre des morceaux pour voix repris au violon ou à la flûte, par exemple, mais dans ces cas, les adaptations sont jouées malgré tout par des instruments « d’orchestre », des instruments faits pour interpréter la musique classique. Jouer de la musique classique à l’harmonica diatonique passe donc dans tous les cas par une réflexion que je peux résumer en quelques points : Premièrement, techniquement, toute musique classique peut être jouée à l’harmonica diatonique, mais cela ne veut pas dire qu’il est opportun de le faire. Il faudra faire un choix : déchiffrer de très nombreux morceaux, en abandonner certains (y compris, hélas, des morceaux dont on adore la version originale). Deuxièmement, L’objectif est de mettre les capacités expressives de l’instrument, bien supérieures à celles de nombreux autres instruments à vent, au service de la musique classique. Cela passera immanquablement par une réflexion sur le choix de la tonalité de l’instrument utilisé en fonction de la tonalité du morceau (ce que les harmonicistes appellent souvent les « positions »). Il faudra aussi réfléchir à l’accordage de l’instrument (pour ma part, je n’utilise actuellement que des harmonicas accordés selon le système « Richter » ou légèrement modifiés pour obtenir un accordage lydien appelé aussi « country tuning »). Troisièmement, parmi les questions générales qui se sont posées – et que je me suis bien amusée à résoudre – il y a celle de l’accompagnement sur lequel vient se poser la mélodie jouée à l’harmonica. Est-il préférable de conserver l’accompagnement original ou d’élaborer un accompagnement modernisé ? Dans le premier cas, l’harmonica diatonique est véritablement considéré comme un instrument semblable à n’importe quel autre plus ancien. Dans le second cas, nous prenons en compte la relative modernité de l’instrument en modernisant le morceau lui-même, ce qui revient à trouver une sorte de compromis entre le morceau classique et l’instrument. Pour illustrer ce troisième point, rien de mieux qu’un exemple concret.
Je vous propose donc d’écouter un morceau très connu, l’Ave Maria de Schubert, ainsi que deux reprises à l’harmonica, composé en 1825 dans le cadre du cycle de lieder op. 62 pour voix et piano. Ecoutons d’abord la version originale chantée en allemand par la soprano américaine Barbara Bonney accompagnée par le pianiste australien Geoffrey Parsons.
Magnifique voix, magnifique musique ! Nous arrêtons notre écoute avant les reprises. Maintenant, voici ma version à l’harmonica diatonique, écourtée elle aussi, avec deux accompagnements très différents sur la même harmonisation originale de Schubert : l’un classique et l’autre plus moderne. Pour les connaisseurs, l’original est en si majeur, Barbara Bonney chante un demi-ton plus bas, donc en si bémol, et, de mon côté, j’ai choisi de jouer en sol majeur avec un harmonica en do, donc en 2e position. Cela me permet de jouer sur la première octave et d’atteindre une grande fluidité, puisque 90% des notes sont des notes aspirées. Par ailleurs, cette position met en valeur les jolis timbres des altérations aspirées enchaînées entre elles ou tenues en fin de phrase (près de la moitié des notes sont des notes altérées). Notons que le morceau peut être jouer dans d’autres positions. De mon côté, j’ai beaucoup hésité entre la 2e position – en sol avec un harmonica en do – et la 11e position – en si bémol avec un harmonica en do, – car les deux permettent de mettre en valeur toute une palette de timbres caractéristique du jeu chromatique à l’harmonica diatonique. Voici donc d’abord ma version avec l’accompagnement original au piano, tel qu’il a été composé par Schubert. Je suis accompagnée virtuellement par le pianiste britannique Paul Gardner.
Et voici maintenant la version modernisée (avec basse, guitare électrique, synthétiseurs et phrasés plus « pop » à la guitare et au piano acoustiques). J’ai élaboré cet accompagnement à l’aide de l’extraordinaire logiciel conçu par PG music : Band in a Box.
Vous aurez pu entendre qu’il s’agissait bien là de deux manières différentes d’aborder l’interprétation de la musique classique à l’harmonica diatonique. L’effet produit n’étant pas le même, l’une ou l’autre version touchera plus ou moins des auditeurs des profils différents. Dans tous les cas, le jeu en vaut la chandelle : dans certains cas, la reprise du morceau à l’harmonica diatonique permettra même aux auditeurs de réécouter ce morceau sous un angle nouveau et de l’apprécier différemment. Par la suite, je n’ai pas enregistré deux versions de chaque morceau choisi, mais ai opté pour l’une ou l’autre approche.

[Harmonica] HARMONICA D’USINE VS. HARMONICA « CUSTOM »

Au moment de choisir un harmonica, on a le choix entre deux catégories d’instruments : les harmonicas sortis d’usine (achetés auprès des marques elles-mêmes ou auprès de revendeurs) et les harmonicas « custom », donc réglés, voire personnalisés. Ces derniers se diviseront en deux sous-catégories : les harmonicas d’usine réglés et optimisés sans remplacement ou ajout de composants (les harmonicas réglés par Harmo’nickel, par exemple) et les harmonicas usinés par le "customisateur" sur la base de plaques d’usine (les harmonicas Brodur, Yonberg et Arkia, par exemple).
Quand on est un joueur de bon niveau et que l’on sait déjà régler soi-même ses harmonicas, c’est une question de goût. Certains jugeront que cela a moins d’importance, surtout quand ils jouent amplifiés et savent sculpter leur son avec des pédales d’effets et un bon ampli. Tout instrument sorti d’usine coûtant environ 30 EUR (pour les marques Hohner, Seydel et Suzuki) fera l’affaire, une fois réglé. D’autres harmonicistes choisiront malgré tout des instruments « customs », pour la beauté du son, l’étanchéité, la précision des réglages. Mais il serait faux de penser que les harmonicas customs sont « un truc de pros ». Quand on est débutant, et surtout quand on apprend à jouer altérations et overnotes, il est important d’avoir un bon instrument, un instrument dans lequel on a confiance. C’est essentiel si on est vraiment motivé et qu’on veut mettre toutes les chances de réussite de son côté : le jeu est plus facile et, par ailleurs, on sait que les difficultés viennent de notre technique et non d’éventuelles faiblesses de l’instrument. Et puisqu’il faut se mouiller un peu de temps en temps… Si je devais conseiller un bon instrument à un apprenti harmoniciste commençant à apprendre les altérations, mon choix (tout personnel) irait soit vers un harmonica d’usine optimisé par Michaël d'Harmo’nickel (Special 20, Golden melody ou Crossover de chez Hohner) soit vers un « Discret », l’un des modèles les moins coûteux de chez Raymond Brodur (Golden melody optimisé et réglé, avec sommier en ébène). (Comme à chaque fois, je ne vous livre ici que mon point de vue, fruit de mon expérience personnelle. Bien entendu, je n’ai aucun intérêt financier ou autre à recommander tel ou tel instrument.)

[Harmonica] SON ACOUSTIQUE NON AMPLIFIÉ vs. SON AMPLIFIÉ

Qui d’entre nous n’a pas vibré en écoutant un blues joué à l’harmonica, un harmonica au son amplifié et transformé par de multiples effets… Comme une guitare électrique, mais en mieux… Beaucoup auront même acheté leur premier harmo après avoir entendu ce son et seront impatients d’en obtenir autant de leur nouvel instrument.
Et c’est là que commence le malentendu sur ce qui fait le son de l’harmonica amplifié blues et, plus généralement, le son de l’harmoniciste… Pour faire simple et rapide : inutile de multiplier les harmos et le matériel, d’écouter ceux qui vous promettent THE son blues, car l’essentiel vient de vous. Certains sonnent très blues avec un SP20 ou un Golden Melody, deux harmos qui ne sont pourtant pas réputés pour être « spécial jeu blues ». C’est l’harmoniciste qui crée son son à 90 % (et c’est ça qui est génial !!!) Avant d’utiliser un bon micro, un bon ampli et des pédales d’effets, il vous faudra impérativement maîtriser les techniques suivantes : 1) Les notes naturelles et au moins grossièrement les altérations les plus utilisées en blues (-2’’, -3’, -4’ pour le blues en 2eposition, -2’’, -3’’, -4’ et -6’ pour un blues en 3e position) ; 2) Les effets (vibrato de gorge, notes attaquées par en-dessous ou « deep bends », notes pleureuses) ; 3) Le « tongue blocking », notamment les « slaps » et les octaves qui sont particulièrement impressionnants quand ils sont amplifiés. L’amplification n’est là que pour… amplifier, donc pour mettre en valeur ce qui existe déjà. Les pédales modifient la sonorité de l’harmonica mais ne remplacent pas l’absence d’effets et de techniques propres au blues. Si vous ne maîtrisez pas ces techniques, l’amplification ne fera qu’amplifier votre son plat et vos erreurs, et vous serez frustrés d’avoir dépensé 300-500 EUR pour un résultat très éloigné de ce que vous souhaitez. Il faut donc avant tout travailler sans amplification ni effets, créer son son en consolidant son embouchure (la position de l’harmonica dans la bouche), en travaillant les techniques importantes pour le son blues. S’amplifier dès le début freine ce processus en donnant une illusion de volume là où le volume est insuffisant et devrait être travaillé. Avoir un beau son acoustique non amplifié, sonore, riche et chaud, est la meilleure garantie que l’on pourra avoir un beau son amplifié plus tard. D’autre part, il permet aussi d’intervenir dans des conditions où les musiciens ne sont bien souvent pas amplifiés (musique trad notamment) en étant satisfaits de ce que l’on entend et fait entendre aux autres. Après, bien sûr, pour obtenir THE son blues, il faudra choisir un bon micro, un bon ampli et des effets, mais ça, c’est une autre histoire, un vaste sujet dont d’autres harmonicistes (notamment Marko Balland) sont de véritables experts.

JEU « A L’OREILLE » vs JEU SUR TABLATURES vs JEU SUR PARTITIONS

Il ne devrait pas y avoir d’opposition entre ces trois manières d’accéder à la musique avec son harmonica, et pourtant certains posent des frontières infranchissables… « Si tu ne joues pas à l’oreille, tu n’es pas un vrai musicien », « La partition tue la musique en l’enfermant », « Jouer sur tablatures est infantilisant », « Si tu ne lis pas la musique, tu n’es pas un vrai musicien » … Des avis toujours très nuancés et empreints du respect d’autrui ! Alors que penser ? Et moi, qu'est-ce que j'utilise ? Eh bien, les trois, mon général !
JOUER D’OREILLE C’est une méthode tout à fait valable quand on joue d'un instrument mélodique. On y ajoutera peut-être une grille d'accords, si on veut pouvoir improviser un peu, mais il est parfaitement possible de procéder ainsi. Cependant, cela ne doit pas conduire à l'approximation. Bien souvent, on entend des « covers » de morceaux très connus présentant des écarts par rapport à l’original qui ne sont manifestement pas le fruit d’une créativité débridée (« ouais, je le joue à ma façon), mais plus d’un travail approximatif sur la mélodie. Il ne faut pas hésiter à télécharger et ralentir le morceau pour trouver les notes exactes sur son instrument. Une fois la tonalité du morceau déterminée (et ça, il faut vraiment le faire), on choisira plus facilement le « bon » harmonica pour le jouer. Après, une fois la mélodie trouvée, on pourra bien sûr s’amuser à « broder » et à improviser. Mais le respect de « la base » est essentiel. JOUER SUR TABLATURES Les tablatures sont le moyen que les harmonicistes ne lisant pas les partitions ont imaginé pour noter les mélodies. D'autres instruments disposent de notation du même style (le whistle irlandais et les tablatures pour guitare, par exemple). Cette notation présente quelques inconvénients souvent pointés du doigt : 1) il n'existe pas un système de notation des tablatures mais une bonne dizaine au moins, 2) en principe, cette notation ne propose que la hauteur des notes et non leur longueur, 3) elle est illisible pour les autres instrumentistes. Néanmoins, elle présente aussi quelques gros avantages : 1) elle est très « intuitive », proche de ce que le corps fait, 2) elle permet de comprendre les techniques utilisées sans enfermer le phrasé dans un rythme figé, ce qui est particulièrement utile pour les styles comme le blues, défini par ses fluctuations et sa souplesse, 3) elle peut servir d'aide-mémoire à un harmoniciste qui, sans vouloir dépendre des partitions, se sent mal à l’aise sans aucunes notes écrites (petite mention très perso). JOUER SUR PARTITIONS C’est la notation occidentale (et même presque universelle) depuis des siècles. Élaborée pour noter la musique la pus complexe, elle offre la représentation visuelle des phénomènes sonores la plus précise. Ses seuls inconvénients pour l’harmoniciste découlent de ce qui a été dit précédemment : 1) il faut l’apprendre, ce qui demande un petit peu plus de travail que d’apprendre les conventions simples des tablatures, mais est loin d’être aussi difficile que certains semblent le penser, 2) elle n’est pas forcément la plus adaptée pour apprendre certaines genres musicaux souvent joués à l’harmonica (la musique trad, le blues, bref, tous les genres originellement transmis oralement), 3) elles ne favorisent pas la mémorisation nécessaire au jeu en groupe et peuvent « couper » un peu le musicien de son public en concert. Comme disaient les anciens, « il n’y a que le résultat qui compte ». Alors, bonne musique à tous, avec ou sans partitions !

[Harmonica & tous instruments] APPRENTISSAGE AUTODIDACTE VS. APPRENTISSAGE AVEC UN PROFESSEUR

Voilà encore une question qui revient souvent sur les forums ! En fait, il ne faut pas forcément opposer ces deux modes d'apprentissage. On peut avoir été autodidacte et éprouver à un moment le besoin d'avoir recours à l'aide d'un professeur. On peut aussi avoir appris les bases avec un professeur et décider de continuer seul.
L'APPRENTISSAGE AUTODIDACTE On entend souvent que l'harmonica (surtout diatonique) est un instrument « intuitif », se prêtant à un apprentissage solitaire et empirique. C'est vrai en apparence : comme le dit souvent Greg Zlap, il suffit de souffler et d'aspirer pour sortir des accords harmonieux. Mais, dépassé ce stade, même les bluesmen apprenaient certaines techniques de jeu et autres trucs de pros par la transmission (le plus âgé apprenant au plus jeune, sur le tas). On peut, bien sûr, utiliser des matériaux déjà tout près : DVD, méthodes en ligne, manuels imprimés… Tout cela est très bien. Mais il manquera dans cet apprentissage mi-empirique mi-livresque l'œil et l'oreille du pro qui sait identifier les difficultés et connaît les moyens de les résoudre, qui saura dispenser des conseils personnalisés, corriger les défauts propres à chacun. L'APPRENTISSAGE AVEC UN PROFESSEUR Travailler avec un professeur permet trois choses : 1) De ne pas perdre de temps à tâtonner. S'il est bon de chercher par soi-même, cela peut décourager sur le long terme. Gagner du temps, c'est gagner en motivation et augmenter ses chances de continuer. Parce que l'apprentissage n'est pas une fin en soi. On veut finir par savoir jouer ! 2) De faire les choses étape par étape. De ne pas chercher à faire des overblows avant de savoir correctement altérer, par exemple. 3) De se discipliner, de lutter contre la procrastination. Le cours avec le prof est dans trois jours. Zut ! Je ne vais quand même pas y aller sans avoir travaillé mon instrument… Allez, hop ! Au travail ! Pour moi, le professeur idéal aura les qualités suivantes : 1) C’est un harmoniciste qui sait vraiment jouer (si ce n’est pas un gage de bonne pédagogie, c’est tout de même la base !), un harmoniciste dont l’élève aime le jeu. Choisir quelqu’un qui se présente comme un bon pédagogue (et qui l’est peut-être dans une certaine mesure), mais dont le jeu ne nous plaît pas, annonce un mauvais départ. Il sera difficile de lui faire confiance, de se persuader que ses conseils seront bons pour notre jeu. 2) C’est quelqu’un qui prend réellement plaisir à transmettre ses savoirs et savoir-faire, qui est à l’écoute de l’élève, qui souhaite réellement le voir progresser. Quelqu’un qui passera son temps à faire des démonstrations de tout ce qu’il sait faire, qui proposera des morceaux hors de portée juste pour faire état de sa virtuosité, mais ne saura ni décomposer ni expliquer ce qu'il fait, ne sera pas un bon professeur. 3) C’est quelqu’un de franc, qui saura complimenter l’élève quand il aura bien fait et le critiquer quand il commet des erreurs pour l’encourager et le faire progresser, mais aussi pour lui permettre d'évaluer lui-même son propre travail, l’une des facultés essentielles qui lui servira toute sa vie. Vous l'aurez donc compris : je conseille à toute personne vraiment motivée de prendre au moins quelques cours avec un professeur. Que ce soit pour démarrer, pour travailler quelques points particuliers ou pour avoir un suivi sur un plus long terme.

[Harmonica] DIATONIQUE vs. CHROMATIQUE vs. TRÉMOLO

Quel type d'harmonica choisir ? Cette question, je me la suis posée moi-même au début et elle est souvent posée dans les groupes et forums. Je vais essayer de résumer ce que m'apporte chaque instrument. D'abord, il est important de dire que ce sont trois instruments différents. Chacun doit donc être abordé pour lui-même et non en comparaison avec les autres.
Le DIATONIQUE
En principe, cet instrument devrait ne jouer que dans quelques gammes (tonalité majeure de l'accordage standard - Richter - et relative mineure, quelques pentatoniques et la musique modale). Or, même si la base reste bien celle-là, on peut, avec des techniques plus avancées (les fameuses altérations et overnotes), jouer bien plus que cela. En plus d'élargir les capacités de l'instrument, ces techniques lui apportent une variété de timbres unique. On sera donc parfois amenés à choisir de jouer avec des altérations et overnotes, alors qu'on pourrait jouer sans, rien que pour le plaisir que procure la richesse des différents timbres en jeu. D'où l'intérêt de posséder plusieurs diatoniques accordés dans différentes tonalités pour avoir le choix des timbres, même si on maîtrise toutes les altérations et overnotes. Cela permet aussi un passage rapide d'une tonalité à une autre. Votre chanteuse n'est pas à l'aise quand vous jouez avec un harmonica en do, car c'est trop aigu pour elle ? Pas grave, vous prenez votre harmo en si bémol, la ou sol, et c'est parti ! Illustration du jeu avec l'harmonica diatonique :
L'un de mes enregistrements :
Le CHROMATIQUE
Même s'il existe des chromatiques accordés dans plusieurs tonalités différentes, la majorité des joueurs de cet instrument jouent avec un seul instrument accordé en do. Créé pour ajouter les notes qui manquaient au diatonique à une époque où on ne jouait ni les altérations ni les overnotes, le chromatique est un instrument parfait sur le plan technique : comme sur un piano, on joue les notes des touches blanches sans rien toucher et les notes noires en actionnant un piston situé généralement à droite de l'instrument. Bref : une vraie merveille ! L'harmoniciste chromatique dispose de moyens d'expression très différents de ceux procurés par le diatonique : ornements multiples grâce au piston, inflexions avant et après les notes, variation des timbres grâce à la pression plus ou moins forte des lèvres sur l'embouchure (même si la palette des timbres à disposition est tout de même moins riche que celle proposée par le diatonique quand il est joué avec toutes les altérations et overnotes). Autre différence : comme on joue sur un seul instrument en do, on doit modifier son jeu pour transposer un morceau (comme sur un piano). Illustrations sonores : Le jeu de Toots Thiemelmans, harmoniciste belge ayant porté le jeu du chromatique jazz à son sommet et inspirant encore aujourd'hui de nombreux grands harmonicistes
Olivier Ker Ourio, harmoniciste français aux origines bretones et réunionaises, au style aussi indescriptible qu'inimitable ; ici, un extrait de son dernier album, "Singular insularity"
Le TRÉMOLO
Ce sont deux instruments mis ensemble. Ils sont accordés de manière identique mais avec un léger décalage des fréquences. Le pluriel est de mise pour cet instrument, tant les accordages diffèrent suivant les marques et modèles. Dans tous les cas, ce sont des harmonicas vraiment diatoniques, donc dont le répertoire sera forcément beaucoup plus limité (à la musique trad, folklore, musette, etc.). Enfin... sauf à le jouer comme certains Asiatiques : en jonglant entre deux ou trois instruments tenus simultanément dans les mains (voir vidéo ci-dessous). Je ne suis pas une experte de cet instrument, d'autres dans le groupe connaissent bien les différents modèles, mais j'apprécie son son qui se rapproche de celui de l'accordéon. Dans certains styles, cela remplit vraiment bien l'espace sonore. Mon trémolo est le seul modèle accordé comme un chromatique (le modèle Fanfare de chez Seydel). Un peu cher, mais bien pratique et avec un très joli son. Deux exemples de jeu au trémolo : - Le jeu de l'école asiatique avec plusieurs trémolos
- Mon premier essai de jeu avec un harmonica trémolo
Les trois instruments présentés sont donc très différents. On peut comme moi choisir de ne pas choisir et jouer de plusieurs d'entre eux. On peut choisir de ne jouer que d'un seul en fonction du style qui nous plaît le plus (si je ne jouais que du blues, je ne jouerais que du diatonique, si je jouais que du jazz, je ne jouerais que du chromatique, mais c'est personnel, car il y a de très grands diatoniciens de jazz). Certains styles sonnent bien, mais différemment sur les deux instruments. L'essentiel est de trouver l'instrument avec lequel on pourra le mieux exprimer ses émotions. Je vous laisse avec ce morceau que j'ai enregistré l'année dernière avec le chromatique, puis avec le diatonique. Vous me direz quelle version vous préférez.

[Tous instruments] LA FABRIQUE DU BLUES - OUTILS PÉDAGOGIQUES POUR MUSICIENS (II)

POUR SE FAMILIARISER AVEC LA GAMME BLUES ET ENRICHIR SON VOCABULAIRE BLUES Comme pour toute musique improvisée, l’un des passages obligés est l’apprentissage plus ou moins littéral de phrasés, de plans caractéristiques du jeu Blues des grands maîtres du genre. Parmi les très nombreux recueils que j’ai pu consulter, trois ont retenu mon attention : 101 Must-Know Blues Licks de Wolf Marshall (Hal-Leonard, 1999, 48 p.) pour les guitaristes, 100 Authentic Blues Harmonica Licks de Steve Cohen (Hal Leonard, 2014, 72 p.) pour les harmonicistes de tous niveaux et Bluesy ! de Sébastien Charlier pour les harmonicistes du niveau avancé (Alien Beats Records, 2019, 54 p.). Dans le premier, les plans sont classés en fonction des styles dont ils relèvent : le Blues électrifié de l’après-guerre, le Chicago Blues rural et précoce (ou Country Blues), le Memphis Blues, le Texas Blues, le Chicago et le Texas Blues modernes, le British Blues et le Blues post moderne. Les plans ne constituent donc pas seulement une mine d’idées inspirantes à développer, mais aussi une introduction à ce qui caractérise les différents types de Blues. Plus fourni, le second recueil, conçu plus spécialement pour les harmonicistes (mais adaptable à d’autres instruments), procède tout à fait différemment, classant les plans en fonction de critères plus techniques (par exemple, les plans fondés sur les intervalles ascendants ou descendants), tout en consacrant vers la fin une section aux plans associés à tel ou tel harmoniciste de Blues célèbres (SBWII, Little Walter, Howlin’ Wolf et Jimmy Reed).
Enfin, le recueil de 92 plans de Sébastien Charlier (répartis en trois parties, suivant que l’on joue en 2e, 3e ou 4e position Blues) est destiné aux harmonicistes avancés voulant enrichir leur vocabulaire Blues de plans plus élaborés, comprenant notamment des overnotes.
Dans un autre esprit, les études proposées par l’harmoniciste britannique Steve Baker permettent d’appréhender l’élaboration d’un Blues, depuis le développement du thème jusqu’à celui des grilles de solo (Blues Harmonica Playalongs, vol. 1, Artist ahead, 2003, 72 p.). Il en est de même pour les volumes de Jim Snidero (notamment Easy Jazz conception, éditions Advance music, 1999, 38 p.). Ces morceaux, conçus pour trompette, clarinette ou saxophone (mais jouables sur d’autres instruments), sont pour certains basés sur la grille et la gamme Blues, et permettent de développer des phrasés Blues-Jazz originaux. Parmi les outils pédagogiques en ligne, signalons le recueil de plans 100 Licks Blues Modifiables et Transposables, proposé par l’harmoniciste français Paul Lassey (disponible dans la rubrique Exercices pour harmonica diatonique de la boutique du site https://www.apprendrelharmonica.com). Associés à l’utilisation du logiciel gratuit Musescore, ils peuvent être joués dans toutes les positions Blues de l’harmonica diatonique et transposés dans toutes les tonalités, donc joués par n’importe quel instrument mélodique (ou par la guitare, dans les solos). Ce sont des plans classiques et variés, pouvant fonctionner sur toute la grille de Blues traditionnel.
POUR AMÉLIORER CERTAINS POINTS PRÉCIS Les outils visant à aider les joueurs de Blues plus avancés à améliorer un point précis, notamment le rythme (ou swing), les charnières entre les différentes grilles (ou turnarounds) et l’élaboration des solos (soloing) sont très nombreux. Mentionnons trois manuels pour guitaristes (mais pouvant être utiles aux autres instrumentistes) : Chicago Blues Rhythm Guitar de Bob Margolin et Dave Rubin (Hal Leonard, 2015, 112 p.), où sont détaillés les motifs rythmiques caractéristiques du Chicago Blues, outil très utile pour quiconque (guitariste, pianiste ou autre) souhaitant améliorer sa rythmique, notamment pour accompagner d’autres musiciens, Blues Turnarounds de Dave Rubin et Rusty Zinn (Hal Leonard, 2003, 38 p.), recueil de motifs charnières puisés chez les plus grands maîtres du Blues, et 12-Bar Blues Solos, également de Dave Rubin (Hal Leonard, 2006, 32 p.), proposant les transcriptions d’un choix de 25 solos arrangés pour les guitaristes de niveau intermédiaire.
Les ressources pédagogiques pour les apprentis Bluesmen sont donc très nombreuses, si nombreuses qu’on peut parfois avoir du mal à s’y retrouver. Bien qu’étant apprentie harmoniciste, je me suis efforcée de prendre en compte également des ressources pouvant être utiles aux autres instrumentistes. Par ailleurs, par souci d’efficacité, je me suis limitée aux ressources encore commercialisées, donc aisément accessibles dans les magasins de musique ou/et en ligne (naturellement, sans nier la valeur de certains outils plus anciens). Je me suis attachée à présenter celles qui m’ont séduite en tant que pédagogue et aidée en tant que musicienne, mais il va sans dire que le choix dépend, en partie, du bagage musical préliminaire et de la personnalité de chacun. Selon le principe énoncé par Socrate, il y a bien longtemps, l’essentiel est d’apprendre à se connaître soi-même et à identifier les ressources efficaces pour soi, le but final étant de prendre toujours plus de plaisir à jouer du Blues et même son propre Blues.

[Tous instruments] LA FABRIQUE DU BLUES - OUTILS PÉDAGOGIQUES POUR MUSICIENS (I)

Certains vous diront que cela ne s’apprend pas, qu’on a le feeling ou qu’on ne l’a pas, que cela se transmet uniquement directement, entre musiciens… Et pourtant, au XXIème siècle, beaucoup d’autres moyens permettent d’appréhender, d’étudier et de développer le Blues –et les autres musiques partiellement ou totalement improvisées– en facilitant tant l’écoute des grands maîtres du passé que la pratique du chant et/ou d’un instrument, processus pouvant idéalement conduire à l’élaboration progressive d’un style riche et personnel. Divers outils pédagogiques peuvent aider les musiciens à nourrir le feeling, à enrichir leur pratique musicale et à trouver leur propre Blues. En voici quelques-uns. POUR APPRENDRE LES GRANDS CLASSIQUES Parmi les nombreux outils proposés, ceux qui me paraissent les moins utilisables en l’état sont les recueils de grands standards du Blues édités en partitions (et tablatures pour les harmonicistes), notamment les recueils des éditions Hal Leonard (dont Chicago Blues, vol. 9 et Blues Classics, vol. 10 pour les harmonicistes et Blues, vol. 7 pour les guitaristes). Dans ce cas, mieux vaut travailler d’oreille ou à l’aide d’un professionnel, car la notation est nettement insuffisante à retranscrire tout ce qui fait l’essence et la beauté de cette musique. Le seul véritable avantage de ces publications (et il n’est pas moindre) réside dans le fait qu’elles fournissent des démonstrations et accompagnements seuls remarquablement interprétés). Mais, ne laissant pas de grilles supplémentaires vides, elles ne permettent pas de développer les capacités d’improvisation (ce qui n’est, du reste, pas son objectif).
POUR APPRENDRE À IMPROVISER SUR LA GAMME BLUES Développer ses capacités d’improvisation est un point crucial dans l’apprentissage du Blues, musique non écrite, art performatif précoce se créant au fil de son exécution. De ce point de vue, les recueils « Jazz pour tous instruments » publiés par Hal Leonard (notamment le vol. 27, Great Jazz Standards, 78 p.) sont plus performants. Certains morceaux sont, eux aussi, basés sur la gamme Blues et, par ailleurs, l’accompagnement fourni laisse toujours au moins une grille vierge pour inviter le musicien à improviser sur chaque thème étudié.
Enfin, pour les harmonicistes à qui l’improvisation Blues pose des difficultés, Paul Lassey a développé un outil pédagogique très performant et innovant : 100 Plans Blues - Initiation à la gamme Blues (disponible dans la rubrique « Recueils de tablatures pour harmonica diatonique » de la boutique du site https://www.apprendrelharmonica.com). Il s’agit de 100 séries de notes de longueur et difficulté variables (4 à 8 notes, notes naturelles seules ou avec altérations) pour apprendre à improviser en 2ème position (par exemple, un Blues en Sol joué avec un harmonica en Do). Le travail consiste à n’utiliser qu’une série de notes tout le long d’un accompagnement (playback) en variant le rythme et les effets. Ce travail est le complément indispensable de l’apprentissage de plans tout faits, car il aide le musicien à développer sa flexibilité et son inventivité. En prenant progressivement confiance en lui, il osera ainsi assez rapidement créer lui-même ses propres plans.

[Trompette, cornet] Les sourdines

Généralement, contrairement à l'harmoniciste, le trompettiste ne joue pas amplifié. Pas besoin, la trompette étant elle-même un dispositif amplifiant le son produit avec l'embouchure. Et puis, l'instrument tire parti de la moindre réverbe naturelle, même la plus minime. Jouer dans son salon suffit à fournir cete petite réverbe sympa qui magnifie n'importe quel son. Pas de recherche à faire dans ce domaine donc, du moins pour le moment. En revanche, l'univers des sourdines permet de modifier le son de l'instrument à l'envie, voir de l'étouffer complètement, si besoin est. Je partage ici mon expérience de joueuse de niveau élémentaire passionnée par le son des instruments à vents et ayant donc essayé de nombreuses sourdines. Mon choix s'est porté sur des sourdines pas trop chères (moins de 100 EUR), car bien souvent je ne trouvais pas que la différence de prix était justifiée. Par ailleurs, ce sont des sourdines faciles à trouver dans les magasins de musique. - Les sourdines "practice"/"d'entraînement", où l'expression "mettre en sourdine" prend tout son sens C'est la sourdine de ceux qui ne veulent pas (ou plutôt bien souvent ne peuvent pas) déranger leur entourage et leurs voisins. Car, contrairement à la flûte traversière, la trompette peut être mise en sourdine, faire autant de bruit qu'une guitare électrique (enfin... presque ;) ). Le problème de ce type de sourdine est qu'il est difficile d'en trouver une permettant de jouer relativement juste et sans contre-pression excessive. Après plusieurs essais, j'ai opté pour la sourdine en plastique "sshhmute" (disponible dans de nombreux magasins, site du producteur : https://www.sshhmute.com/). Elle est excellente et réponds aux trois critères : 1) elle assourdit vraiment beaucoup le son, 2) elle ne présente pas une contre-pression excessive, 3) elle permet de jouer relativement juste sur toute la tessiture (jusqu'au sol aigu dans mon cas, au-delà, il faut demander l'avis de joueurs plus avancés).
- Les sourdines sèches/droites (eng "straight"), devenez un "sculpteur de son" Je suis littéralement passionnée par ces sourdines ! Après en avoir essayé des très légères en aluminium et plutôt lourdes toutes en cuivre, j'ai opté pour deux sourdines en aluminium avec fond en cuivre (une Denis Wick pour la trompette, puis une autre Wallace, plus logeable pour le cornet). C'est un bon compromis : la sourdine est légère, mais avec une résonnance cuivrée incroyable ! Elles sont bonnes toutes les deux, mais j'aime bien le petit fond en caoutchouc de la Wallace (cela permet de la poser sans choc). Ma dernière acquisition est la Denis Wick en bois. C'est encore autre chose. Le son est plus atténué, plus doux, mais aussi plus "boisé", un peu à la clarinette par endroits. C'est vraiment très joli. La sourdine est légère, juste et conforable à jouer, mais amateurs de sons "cuivrés" s'abstenir.
- La sourdine "cup"/"coupelle", LA sourdine pour ceux qui n'en veulent qu'une Honnêtement, si je ne devais en emporter qu'une avec moi en voyage, ce serait celle-là. Certes, elle n'est pas très logeable (j'ai dû lui acheter une pochette spéciale, car je ne savais pas comment la protéger), mais elle remplace la sourdine "practice" (il suffit d'ajuster hermétiquement la "cup" sur le pavillon de l'instrument), la sourdine sèche (il faut juste ôter la "cup" ; ce n'est pas le son de ma chouchoutte cuivrée, mais cela fait le taf) et même une sourdine pour un son jazz (il faut régler l'écart entre la "cup" et le pavillon selon ses goûts). Bref, c'est la sourdine polyvalente par excellence ! La mienne est (à nouveau) une Denis Wick (excellent rapport qualité-prix), mais il y en a d'autres.
Bien sûr, il existe beaucoup d'autres sourdines dans divers matériaux et toujours plus inovantes, mais les sourdines présentées précédemment ont le mérite d'apporter pour un prix raisonnable un net plus pour les instrumentistes qui aiment "sculpter" leur son en fonction des morceaux joués. Et penser que ces dispositifs modifient le son "à l'ancienne", de manière purement aoustique, sans matériel électrique ni pédales d'effets, eh bien moi, cela me fascine !

[Trompette] Les sourdines d'entraînement (et autres sourdines permettant d'atténuer le volume sonore de la trompette)

Plus encore que la majorité des autres instruments, les cuivres sont des instruments très "physiques", exigeant une pratique quo...