mardi 22 août 2023

[Harmonica diatonique] Musique classique à l'harmonica diatonique - Généralités

J’ai commencé l’harmonica diatonique il y a environ sept ans parce que j’étais fascinée par le son et les capacités expressives de cet instrument, et ce dans des genres musicaux très différents. Je me suis dit que ce son incarnait très exactement ce que la musique m’inspirait et qu’il me permettrait sans aucun doute d’exprimer au plus près mes émotions. Très vite j’ai appris que ce qui me plaisait était le jeu chromatique sur l’harmonica diatonique, je me suis donc lancée dans l’apprentissage des altérations et des overnotes qui m’a occupé pendant un bon moment et qui, je suppose, sera toujours au cœur de mes préoccupations. Après m’être essayée dans de nombreux styles, j’ai eu envie d’entendre comment sonnerait la musique classique que j’aimais si elle était interprétée à l’harmonica diatonique. J’ai enchaîné les enregistrements depuis. Avant tout, un constat s’impose : l’harmonica diatonique n’est pas fait au départ pour jouer de la musique classique (ni du blues, d’ailleurs). Il a été créé au milieu du XIXe siècle pour jouer de la musique folklorique et populaire allemande au sens large. On n’a commencé à développer sur cet instrument un jeu chromatique avec altérations et overnotes que récemment, durant ce dernier demi-siècle. Aucune musique « classique » au sens strict n’a donc été composée pour l’harmonica diatonique. Certes, la composition pour un instrument précis est un concept assez récent qui ne s’est renforcé qu’au XIXe siècle. Certes, nous sommes habitués à entendre des morceaux pour voix repris au violon ou à la flûte, par exemple, mais dans ces cas, les adaptations sont jouées malgré tout par des instruments « d’orchestre », des instruments faits pour interpréter la musique classique. Jouer de la musique classique à l’harmonica diatonique passe donc dans tous les cas par une réflexion que je peux résumer en quelques points : Premièrement, techniquement, toute musique classique peut être jouée à l’harmonica diatonique, mais cela ne veut pas dire qu’il est opportun de le faire. Il faudra faire un choix : déchiffrer de très nombreux morceaux, en abandonner certains (y compris, hélas, des morceaux dont on adore la version originale). Deuxièmement, L’objectif est de mettre les capacités expressives de l’instrument, bien supérieures à celles de nombreux autres instruments à vent, au service de la musique classique. Cela passera immanquablement par une réflexion sur le choix de la tonalité de l’instrument utilisé en fonction de la tonalité du morceau (ce que les harmonicistes appellent souvent les « positions »). Il faudra aussi réfléchir à l’accordage de l’instrument (pour ma part, je n’utilise actuellement que des harmonicas accordés selon le système « Richter » ou légèrement modifiés pour obtenir un accordage lydien appelé aussi « country tuning »). Troisièmement, parmi les questions générales qui se sont posées – et que je me suis bien amusée à résoudre – il y a celle de l’accompagnement sur lequel vient se poser la mélodie jouée à l’harmonica. Est-il préférable de conserver l’accompagnement original ou d’élaborer un accompagnement modernisé ? Dans le premier cas, l’harmonica diatonique est véritablement considéré comme un instrument semblable à n’importe quel autre plus ancien. Dans le second cas, nous prenons en compte la relative modernité de l’instrument en modernisant le morceau lui-même, ce qui revient à trouver une sorte de compromis entre le morceau classique et l’instrument. Pour illustrer ce troisième point, rien de mieux qu’un exemple concret.
Je vous propose donc d’écouter un morceau très connu, l’Ave Maria de Schubert, ainsi que deux reprises à l’harmonica, composé en 1825 dans le cadre du cycle de lieder op. 62 pour voix et piano. Ecoutons d’abord la version originale chantée en allemand par la soprano américaine Barbara Bonney accompagnée par le pianiste australien Geoffrey Parsons.
Magnifique voix, magnifique musique ! Nous arrêtons notre écoute avant les reprises. Maintenant, voici ma version à l’harmonica diatonique, écourtée elle aussi, avec deux accompagnements très différents sur la même harmonisation originale de Schubert : l’un classique et l’autre plus moderne. Pour les connaisseurs, l’original est en si majeur, Barbara Bonney chante un demi-ton plus bas, donc en si bémol, et, de mon côté, j’ai choisi de jouer en sol majeur avec un harmonica en do, donc en 2e position. Cela me permet de jouer sur la première octave et d’atteindre une grande fluidité, puisque 90% des notes sont des notes aspirées. Par ailleurs, cette position met en valeur les jolis timbres des altérations aspirées enchaînées entre elles ou tenues en fin de phrase (près de la moitié des notes sont des notes altérées). Notons que le morceau peut être jouer dans d’autres positions. De mon côté, j’ai beaucoup hésité entre la 2e position – en sol avec un harmonica en do – et la 11e position – en si bémol avec un harmonica en do, – car les deux permettent de mettre en valeur toute une palette de timbres caractéristique du jeu chromatique à l’harmonica diatonique. Voici donc d’abord ma version avec l’accompagnement original au piano, tel qu’il a été composé par Schubert. Je suis accompagnée virtuellement par le pianiste britannique Paul Gardner.
Et voici maintenant la version modernisée (avec basse, guitare électrique, synthétiseurs et phrasés plus « pop » à la guitare et au piano acoustiques). J’ai élaboré cet accompagnement à l’aide de l’extraordinaire logiciel conçu par PG music : Band in a Box.
Vous aurez pu entendre qu’il s’agissait bien là de deux manières différentes d’aborder l’interprétation de la musique classique à l’harmonica diatonique. L’effet produit n’étant pas le même, l’une ou l’autre version touchera plus ou moins des auditeurs des profils différents. Dans tous les cas, le jeu en vaut la chandelle : dans certains cas, la reprise du morceau à l’harmonica diatonique permettra même aux auditeurs de réécouter ce morceau sous un angle nouveau et de l’apprécier différemment. Par la suite, je n’ai pas enregistré deux versions de chaque morceau choisi, mais ai opté pour l’une ou l’autre approche.

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